Barthélémy Toguo sera à Abidjan ce mardi 6 août 2019 dès 19h pour une soirée film et débat initiée par l’artiste plasticienne Aya N’da. A cet effet, la Galerie Houkami Guyzagn sera le lieu pour visionner le film intitulé : « Barthélémy Toguo: Deux mains… le Monde ». Ce film réalisé en 2014 par Thierry Spitzer sera l’occasion de découvrir l’artiste à travers son parcours, son travail et ses engagements. Dans l’attente de cette rencontre, découvrez notre interview.

Barthélémy Toguo, un artiste pluridisciplinaire
Qu’est ce que cela vous fait de revenir en Côte d’Ivoire ?
Beaucoup de plaisir. De l’Emotion. Mes débuts dans l’art, c’est en Côte d’Ivoire. C’est là-bas que j’ai vraiment commencé à exercer le métier. A l’âge de 20 ans, après avoir fait mon cycle secondaire en Côte d’Ivoire, je m’inscris à l’Ecole Nationale des Beaux Arts. C’est à ce moment là que j’ai commencé à pratiquer au quotidien la chose artistique. C’était un moment où l’Afrique changeait sur le plan politique (1989-1990) et il y avait un bouleversement inattendu. J’ai assisté à la fin du partie unique pour voir apparaitre le multipartisme avec tout ce que cela apportait comme changement. C’était un moment historique pour la Côte d’Ivoire et toute l’Afrique. Un changement politique dans le continent s’opérait et un bouleversement du système scolaire universitaire également. Ce vent est passé et les artistes ont continué d’être.
Ce qu’il faut cependant retenir, c’est que l’Afrique a connu un début de liberté d’expression ou les opposants, ici et là, pouvaient s’exprimer. Un moment incroyable que nous avons vécu et le plus important est d’avoir assisté à ce moment et de pouvoir en parler.
Ce moment a donc impacté votre façon de voir le monde et naturellement de travailler. Nous avons constaté qu’en tant qu’artiste pluridisciplinaire, vous appréciez investir l’espace avec notamment des installations en trois dimensions. Pouvez-vous nous dire ce que ce mode d’expression représente pour vous?
Les installations en 3D, c’st une manière de rendre beaucoup plus visible les installations et de montrer aux spectateurs une autre dimension. C’est aussi comment rendre possible une autre manière de présenter le travail. Dans cette démarche, il y a une dimension de mise en scène qui est parfois spectaculaire. On entre plus en contact et entre dans la découverte d’une démarche artistique plus spectaculaire. L’importance est de montrer cette variété, diversité de la démarche artistique par une installation. Cela ne signifie pas que les oeuvres en deux dimensions n’ont pas de valeur. C’est une manière de montrer la pluralité des démarches et de mettre le spectateur dans des contrastes différents.
Nous souhaitons maintenant aller plus loin dans votre démarche artistique et aborder la question de votre engagement dans le domaine des arts à travers le projet de Bandjoun Station installé au Cameroun. Pourquoi cet engagement et quel est votre vision à travers ce projet ?

Les Africains de ma génération et mes aînés avaient beaucoup de choses à dire à l’Afrique et critiquaient, portaient un jugement critique sur le système et la politique africaine. Aujourd’hui, nous devons être dans une meilleure démarche et faire le contraire. C’est vrai qu’il y des problèmes mais il faut être un acteur dans le domaine et agir sur place. Ainsi, j’ai des compétences et des possibilités de créer un espace avec un musée pour permettre à de jeunes artistes du monde entier de venir à Bandjoun. L’objectif est double. Il a une dimension artistique de permettre une immersion des jeunes et il a une dimension agricole, car on doit bien manger pour bien travailler. En effet, nous avons un champ où nous cultivons du maïs, de la banane, du manioc et du café. J’avais une volonté de mettre ce projet sur pieds en Afrique. J’avais un terrain à Bandjoun et c’est le lieu idéal pour l’art plastique qui est déjà implanté dans la région. L’idée était de créer un mariage entre l’art contemporain et l’art classique.

Pour votre information, le musée de Bandjoun Station compte plus de 1125 oeuvres issues, pour la grande majorité, d’échanges avec des artistes et des collectionneurs. Elle comprend aussi bien des peintures de Soly Cissé ou de Dominique Zinkpè que des dessins de Louise Bourgeois, des lithographies de Miró et Tàpies, ou encore une sculpture sonore de Laurie Anderson. Il faut noter que des artistes comme Kehinde Wiley, Christa Eka, Elsa M’bala, Hervé Youmbi ou encore Gabriel Tegnoto ont déjà été reçus en résidence et cette année, Samuel Gelas sera présenté.
En vue d’en savoir plus, rendez-vous ce mardi 6 août 2019 à 19h à la Galerie Houkami Guyzagn pour la soirée film-et-débat en présence de Barthélémy Toguo.
A propos de Barthélémy Toguo
Né en 1967, Barthélémy Toguo vit et travaille entre Bandjoun (Cameroun) et Paris (France).
Il est diplômé de l’École Nationale supérieure des Beaux-Arts d’Abidjan (Côte d’Ivoire), de l’École Supérieure d’Arts de Grenoble (France ) de la Kunstakademie à Düsseldorf (Allemagne).

Chevalier des arts et des lettres de la République Française, nommé au prix Marcel Duchamp-Centre Georges POMPIDOU (édition 2016) il est surtout, un artiste pluridisciplinaire, dont les travaux sont exposés dans le monde entier.
Constatant la double impasse de ne pouvoir d’une part sauvegarder le patrimoine artistique africain sur le continent africain, ni d’autre part y établir des projets culturels ambitieux, B. Toguo décide de créer 2008, Bandjoun Station, un projet artistique à but non-lucratif. C’est un centre d’art contemporain à la fois musée et résidence d’artistes, doublé d’un volet agricole qui a été inauguré en 2013 au Cameroun, en pays Bamiléké.
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