Pahé ou l’enfant terrible du Gabon

Pahé, c’est le Roi de la « déconnade » depuis 1990 ! C’est l’œil attentif pour faire fourcher la langue ! Il est un dessinateur, illustrateur et caricaturiste gabonais mais surtout un fin humoriste qui aime la satire !

Véritable Ambassadeur de la culture gabonaise, il ose critiquer tous les acteurs du monde politico économique et social. Il se concentre particulièrement sur ceux du Gabon son pays natal.

Dure donc de garder son sérieux face à ce personnage emblématique de la République du Gabon qui met tous les sujets sur la table. Il incite le lecteur gabonais, et les autres, à s’interroger sur les événements qui rythment sa vie quotidienne. Et il dérange car il réveille les consciences !

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Le terrible

Des débuts sur les bancs de l’école 

Pahé, c’est le diminutif de Patrick Essono Nkouna soit le « PA » de Patrick et le « E » de Essono. Mais d’où vient le « H » ? Vous allez rire mais Pahé dit que c’est juste « pour faire chier le monde ». Donc ne cherchez rien de logique ! Il me fait penser à « Tchiéni Gbanané, l’enfant terrible » qui parlait dans le ventre de sa mère. Un conte pour ceux qui ne l’on pas lu qui est vraiment plein d’humour et de perspicacité. Et il ressemble en tout point à Tchéni Gbanané. Il dit être né à Bitam avec un crayon dans la main et devait surement déjà faire de nombreux gribouillis dans le ventre de sa mère. Il développa ce talent mais fut « exilé » en France en 1985, comme il dit, par ses parents qui ne souhaitaient pas qu’ils se distraient de trop avec le dessin. C’était sans compter sur le fait qu’il remporterait son premier concours de dessin durant le fête de Noël. Il continua donc à aiguiser son poignet au collège et au lycée en dessinant pour le journal du Lycée d’Etat de l’estuaire à Libreville. C’est là que naquît « Dipoula, le pompeur », un de ses principaux personnage. Il deviendra plus tard « Dipoula, le petit albinos ».

De l’école de comptabilité à l’ISAP

Il sera ensuite orienté en 1990 dans une école de comptabilité gestion par ses parents. Une formation qui n’est pas de son goût puisqu’il reconnaît avoir « séché » les cours pour dessiner dans les « canards » du pays notamment Gabon Libre, Oreyti, Le Progressiste…. C’est donc sans surprise qu’il ressort en 1996 sans diplôme de comptabilité mais avec une expérience en dessin de presse non négligeable. Il s’envole donc pour la France une nouvelle fois pour l’Institut Supérieur des Arts et Publicité (ISAP) de Paris : Grosse déception ! Il pensait faire de la BD et il se retrouve à faire de la perspective, de l’histoire de l’art…. Une série de matières qu’il juge ne pas lui convenir sauf le dessin…de nus. Pour la petite anecdote, il rajoute :  « même si la plupart des modèles étaient des thons » (rire). Pahé revient donc au Gabon avec son style et son ton qui plaît et se retrouve à travailler dans la plupart des journaux du pays. Les Gabonais adorent !

La révélation au public

C’est en 2001, lors du Premier Festival de la BD de Libreville dénommé les JABD qu’il est découvert par TV+, une télé privée, dans un reportage ; et surtout il est repéré par Barly Baruti, un dessinateur congolais. Invité, comme coup de cœur de ce dernier, à une émission de variété sur la chaine, il griffonne des dessins le temps que son tour de parole arrive sans savoir que la caméra est pointée sur ses dessins. 4 jours plus tard, un coup de fil de la production qui a adoré ses dessins. Et Hop, un contrat signé avec TV+. Il y fera des dessins pendant le journal de 20h. Il y animera, également, chaque week-end, une émission satirique : « les Ninfos de Pahé ». Il les qualifie de « l’ancêtre équatorial du Petit Journal sur CANAL + ».

Le début de sa carrière

Il sera ensuite invité par la force du « bouche à oreille » à des festivals de dessin et de la BD au Cameroun, à Kinshasa, à Angoulême, à Abidjan et à Alger. En 2003, il participa à un collectif BD durant le Fescary de Yaoundé ainsi qu’au Cocobulles d’Abidjan. C’est lors de ce deuxième événement que la patronne du Fescary présente le collectif à un jeune éditeur, Pierre Paquet. Ce dernier après avoir feuilleté quelques dessins de Pahé demande : « où puis-je rencontrer ce Pahé ? » Et Hop ! 2004 : Début de nouvelles aventures ! Un petit saut à Yaoundé pour signer un contrat pro d’où naitront : La vie de Pahé (2 tomes), Dipoula le petit albinos (3 tomes) et une adaptation de La vie de Pahé en dessin animé de 75 épisodes de 7 minutes, Le Monde de Pahé, diffusée sur France 3 et la RTBF.

On peut également compter à son actif plusieurs recueils de caricatures de presse. Depuis 2006, il est l’auteur d’ouvrages dont Les choses du pays, G, Laissez-nous avancer, Ces bouilles célèbres de Gabao, Ali 9 Roi de la République Gabonaise, Le changement, S’est maintenant, Operation corned beef, Best of Pahé.

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L’enfant du Gabon

Né bègue, donc étant souvent la risée de tout le monde dès la première prise de parole, il était impossible pour Pahé de s’exprimer clairement. Il décida de se lâcher sur les feuilles et de raconter des histoires. Il a beaucoup lu les BD et journaux d’humour et de critiques français tel que Fluide, Le Canard enchainé, Charlie Hebdo… Il dit : « J’adore le ton irrévérencieux, le style, le politiquement incorrect, la provoc, leur humour, oser braver l’interdit, pourquoi pas ?…. Pour être dessinateur de presse, il n’y a pas 36 soluces, si vous n’avez pas un coin d’humour en vous, please, faite autre chose. Un dessinateur de presse est d’abord un comique caché en lui. »

Il rappelle que la vie de tous les jours est sa source d’inspiration : « Il y a tellement de choses à raconter au Gabon, surtout les dessins politiques, sans oublier le social ». C’est ainsi que le quotidien des Gabonais est décrit par Pahé.

Bien que préférant le dessin de presse, il veut s’investir dans la BD pour les Gabonais et plus largement pour les Africains. Il indique : « Je fais d’abord des histoires du Gabon, pour un public gabonais. Hors de question d’aller chercher la gloire chez les autres, si déjà chez soi on n’est pas connu ! ». Je trouve que c’est une belle philosophie car il est important pour nous africains d’avoir des personnages emblématiques tels que Pahé. Il peut déplaire, il peut faire sourire, il peut agacer, il peut énerver, il peut plaire, il peut gêner, il peut enthousiasmer, il peut… il peut…, je dirais il peut tout par la force de l’image car elle laisse chacun libre de son appréciation et de son jugement.

BLOG

Le passionné

Pahé préfère le dessin de presse car c’est beaucoup plus compliqué de raconter un événement en une seule image. Cela demande de la réflexion, de l’imagination et de la concentration. Il faut trouver l’illustration qui fera un déclic chez le lecteur. Il aime aussi la BD, bien que cela prenne plus de temps, sauf lorsque l’éditeur hurle car le boulot n’avance pas s’amuse –t-il à dire. Il me plait bien Pahé car il est passionné et s’en amuse. D’ailleurs, il doit donner du fil à retordre de temps à autre à Pierre Paquet, son éditeur.

C’est aussi un auto-producteur. Il produit des albums, dessins textes et maquette au format de poches. Un format plus accessibles et surtout à moindre coût ainsi les recueils se vendent au Gabon comme « de petits bout de manioc ». Une alternative intéressante qui permet aux Gabonais d’accéder à ses ouvrages bien que l’impression et la distribution soient très couteuses. En effet, le distributeur officiel au Gabon, prend 40% sur le prix de vente, c’est la mort assurée… Vivement l’imprimerie Pahé ! On le souhaite de tout cœur et on espère que ce projet verra le jour…

En parlant de projet, Pahé élabore en ce moment 5 Ans déjà, un recueil de caricatures qui racontent le mandat d’Ali Bongo de 2009 à 2014. La plupart des dessins parus sur son blog et sa page Facebook. Il s’est attaché à ce qu’il n’y ait aucunes reprises, rien que du neuf, et tout le monde y passe. Par ailleurs, il aimerait terminer La vie de Pahé 3-Loveman. Une BD de 50 pages qu’il doit finaliser pour Pierre Paquet.

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Celui qui parle

Pahé aime être libre dans sa pensée et dans l’expression de son art. Il n’aime pas se faire imposer un style, une orientation sur un sujet par un secrétaire de rédaction, le journal ou le rédacteur en chef. Il refuse le dictat de la profession, sans oublier la censure sous prétexte de ne pas avoir de problème avec le pouvoir… C’est pourquoi, il a abandonné la presse et a décidé de se concentrer sur son blog, sa page facebook et en produisant lui même ses propres recueils de caricatures. Ses albums ne sont donc plus contrôlés par un quelconque sponsors et il peut comme il dit « se lâcher » dans l’arène pour le plaisir de ses followers.

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2 réflexions sur “Pahé ou l’enfant terrible du Gabon”

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