Du 24 mars au 14 juin 2017, l’artiste Soly Cissé expose “Les mutants” au Musée Dapper à Paris (France). Retour sur cette exposition qui traite de nombreux sujets tels que l’art de la transgression.

Les Mutants de Soly Cissé
L’expositions de Soly Cissé est un mélange de toiles et de sculptures.
Ces toiles nous interpellent sur la question de la déshumanisation ou de la transgression tandis que ses sculptures sont une matérialisation en trois dimensions de ces transgressions.
La déshumanisation en toile de fond pour une compréhension du monde contemporain
Le sujet de la déshumanisation que nous avons récemment abordés lors de notre séjour béninois notamment avec l’exposition African Art Tour qui était accessible jusqu’au 25 mars dernier à la Fondation Zinsou à Cotonou (Bénin) où Soly Cissé était d’ailleurs exposé.
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L’exposition “Les mutants” nous permet d’intégrer l’univers de l’artiste qui réunis des éléments qui, à priori, ne sont pas destinés à l’être : on voit tantôt des formes mi-humaines, mi-animales, mi-végétales se mélanger, se frôler, se confondre… et on voit tantôt des lettres, des chiffres, du collage, des codes barres se bousculer tout en formant une harmonie certaine.
Tous ces éléments symbolisent la societe de consommation omniprésente qui brouillent finalement nos repères et nous pousse à la recherche de sens. C’est donc un regard sur les mutations de la société pour questionner la condition humaine avec ses incohérences et ses injustices.
Il s’attache également à la représentation moderne des éléments culturels africains en les désacralisant et en les sortant de leur univers de base, pour les personnifier, les sublimer et leur donner une dimension nouvelle: celle qui permet la transgression du patrimoine “africain”. Ce qui nous amène à nous interroger sur la capacité de ces éléments culturels à participer à la démarche globale de compréhension du monde contemporain.

La présence animale, interprétation consciente ou subconsciente ?
La présence animale, quant à elle, nous interpelle par son omniprésence. Elle exprime ce rapport entre les esprits et les divinités et la relation ambivalente entre les espèces humaines et animales sous fond de religion animiste. Ceci fait donc tout naturellement référence à l’importance des divinités animales dans les cultures des sociétés de l’Afrique subsaharienne.
Ces figurations animales sont appelées par Soly Cissé les “Soso” soit le “So” de Soly et le “So” de Socé, le nom du peuple apparentie au groupe mandingue auquel appartient son père.

Dans l’ensemble des œuvres, j’ai été attirée par la présence d’un animal qui me fait étrangement penser à un chien ou un félin. Il est très présent dans l’exposition et il a un regard presque humain. Il se pourrait qu’il soit le résultat de cette transformation mi-humaine, mi-animale et mi-végétale qui nous interroge sur le rôle que ces êtres jouent sur notre societe ou dans notre subconscient.

La sculpture, vers une matérialisation des mutations?
La sculpture est un médium que Soly Cissé exploite à merveille avec notamment des totems.

Ces totems m’interpellent particulièrement car ils sont pleins de sens. Ils traduisent différentes choses selon les prismes que l’on choisi. Pour certains d’entre eux nous pouvons voir des photos qui me font penser à ces amulettes que portent de nombreux sénégalais autour du cou, avec une photo d’un parent, en mémoire de cette défunte personne. Ces totems seraient-ils des objets rituels et spirituels mais en grandeur nature?
On remarque aussi que certains ont les bras levés comme pout rappeler la pratique des Soninke et Dongo du Mali qui imploraient les divinités en vue de faire tomber la pluie sur la région. Est-ce que nous devons en déduire que ces totems sont un mélange de différents rites et coutumes africains?
Deux statuettes trônent au milieu de la salle. Elles sont pour moi la représentation de cet etre mi-humain, mi-animal et mi-végétal que j’ai précédemment évoqué. Ils semblent familier et tout droit sorti de notre imaginaire. Ils ressemblent à des gardiens privilégiés d’une histoire commune partagée par les espèces humaines et animales.
Soly Cissé nous invite donc à nous interroger sur notre relation au Monde qui nous entoure et à nos relations aux mondes spirituels et animales. Ce retour à la compréhension des mythes et croyances de l’univers traditionnels et animistes sont autant d’éléments qui doivent nous permettre de comprendre le Monde contemporain.

Qui est Soly Cissé?
Né à Dakar en 1969, Soly Cissé est peintre, sculpteur, videaste et scénographe. Apres etre sorti major de sa promotion de l’école des Beaux Arts de Dakar en 1996, il est sélectionné en 1998aux biennales de Sao Paulo et de Dakar, puis en 20000 à celle de La Havane. Exposant régulièrement dans des galeries ou centres d’art, il est également présent à l’échelle internationale et à participe à de prestigieuses expositions, salons et foires. Il a fait partie de l’exposition collective “Sénégal contemporain’ organisée par le Musée Dapper en 2006 et dont l’ouvrage reste une référence incontournable.
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