Du 9 au 11 novembre 2018, la foire d’art Also Known As Africa revient pour sa troisième édition à Paris. Cette année, AKAA vise à chercher de nouveaux dialogues et regards croisées entre l’Afrique et d’autres régions du monde.
Par Tanja Schreiner

Placer l‘Afrique au centre d’une nouvelle cartographie

C’est dans les chaleureux locaux de Maison Intègre que nous reçoit Victoria Mann, fondatrice de AKAA, pour nous dévoiler le programme de la troisième édition de sa foire d’art. L’aménagement intérieur de la jeune maison de design – composé des tabourets nupés, des statues ou aussi d’un grand lit sénoufo, décoré affectueusement par des coussins en tissu baoulé – nous amène directement du 18ème arrondissement de Paris en Afrique. En tant que l’un des nouveaux partenaires de la foire, Maison Intègre, fondée en 2017 par Ambre Jarno, une jeune française passionnée du Burkina-Faso, réalisera cette année le mobilier de l’espace des conférences, le « AKAA Underground ».
AKAA, qui se déroulera du 9 au 11 novembre au Carreau du Temple, est la seule foire d’art contemporain et de design centrée sur l’Afrique en France. « J’ai toujours voulu créer un événement qui fédère autour de l’Afrique », explique Victoria Mann. « Le but n’était pas de mettre une étiquette sur des artistes, mais plutôt de créer une foire qui invite tout artiste et créatif à revendiquer son lien à l’Afrique. » C’est d’ailleurs cet objectif qui a inspiré le nom de la foire Also Known As Africa (« Connu aussi sous le nom Afrique »), qui, lors de ses dernières éditions, a attiré en moyenne 15 000 visiteurs.
135 artistes de 40 pays

Cette année, l’événement porte le message encore plus loin en mettant un focus sur les relations sud-sud. « L’idée est de créer une nouvelle cartographie de l’art contemporain. Pour une fois, on n’a pas les États-Unis ou l’Europe au centre de cette carte, mais on y met l’Afrique et on voit tous les liens qui se dessinent avec les autres parties du monde. » La foire verra ainsi une forte présence des artistes de l’Amérique Latine, notamment du Brésil, de l’Argentine, des Caraïbes, mais aussi des États-Unis ou de la Corée du Sud. En total, 45 galeries et 135 artistes de 40 pays y seront représentés.
De Côte d’Ivoire, elles seront deux galeries à faire le chemin jusqu’à Paris : la LouiSimone Guirandou Gallery présentera des œuvres de l’artiste plasticien ivoirien Ernest Dükü et du photographe ivoirien Ananias Leki Dago, alors que la Galerie Cécile Fakhoury a opté pour une artiste franco-algérienne, Dalila Dalléas Bouzar. Cette dernière occupera en outre une place particulière durant l’événement, ayant reçu une carte blanche pour créer une performance dans le AKAA Underground. S’inspirant d’un studio de peinture ambulant, qu’elle avait créé dans plusieurs quartiers de Dakar lors de la Biennale de cette année, elle accueillera les visiteurs de AKAA dans son « Studio Paris ».
On trouvera également des touches ivoiriennes à la galerie marseillaise Polysémie, qui représentera le grand dessinateur et poète ivoirien Frédéric Bruly Bouabré, l’un des artistes ivoiriens les plus connus sur le plan international. De plus, la photographe Joana Choumali exposera son travail à l’espace de la Loft Art Gallery venue de Casablanca – ville où l’ivoirienne a poursuivi ses études en communication graphique.

« L’artiste est de partout et de nulle part »
Un autre artiste que l’équipe autour de Victoria Mann a souhaité mettre en lumière est le photographe sud-africain d’origine américaine, Roger Ballen, notamment connu pour ses photographies brutales sur la vie de la population rurale blanche d’Afrique du Sud. Sur AKAA, il présentera le résultat d’une « collaboration silencieuse », réalisé à des milliers de kilomètres de distance avec l’artiste allemand Hans Lemmen. « Les deux artistes se sont échangés des œuvres à distance, ils n’ont pas communiqué durant plusieurs mois et ont chacun retravaillé les œuvres de l’autre, l’un étant dessinateur, l’autre photographe », explique la fondatrice.

Ces nouveaux dialogues et regards croisés entre l’Afrique et d’autres régions du monde se reflèteront aussi dans la programmation culturelle de la foire. Des tables rondes aborderont par exemple des sujets comme la « black identity » dans l’art, le corps comme thème chez les artistes contemporains originaires du monde arabe ou aussi la scène artistique contemporaine du Cuba, pays où les histoires et les géographies se croisent. Dans cette même voie, l’artiste Susana Pilar présentera une œuvre monumentale dans la nef centrale du Carreau du Temple, qui thématisera ses origines croisées venant de Chine, d’Afrique, des États-Unis et de Cuba.
Malgré cette nouvelle ouverture et des réflexions sur un futur développement de la foire à l’étranger, Victoria Mann souhaite que AKAA reste une foire à taille intime qui permet davantage d’échanges avec le public et de découvertes de nouveaux talents. Pour elle, il reste un vrai travail pédagogique à faire sur la valeur de l’art issu d’Afrique – encore souvent sous valorisé, même si les prix au marché de l’art augmentent – et auquel elle voudrait contribuer via AKAA : « On part des clichés et on essaie de les transformer. »
A propos de Tanja Schreiner
Tanja Schreiner est une journaliste freelance passionnée de Culture et avec un goût pour les arts en provenance du continent Africain. Elle a notamment travaillé pour Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH, pour l’Institut Goethe de Côte d’Ivoire et récemment pour le Magazine Paris Berlin. Dans ce cadre elle a contribué au lancement du magazine Paris Abidjan.
Elle rejoint la Fondation Original comme Rédactrice de contenu et nous permettra d’avoir un regard sur l’actualité des Arts et Culture avec un focus sur l’Afrique qui se déroule à Paris et plus largement en France. Vous aurez le plaisir d’apprécier sa plume.
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