Les Âmes du Peuple Noir de Roméo Mivekannin : un dialogue sur la représentation des peuples noirs dans le mode du 19ème siècle à nos jours

Pour sa première exposition personnelle en Afrique, Roméo Mivekanin a choisi de poser ses oeuvres à Abidjan en Côte d’Ivoire. L’exposition “Les Âmes du Peuple Noir” se tient jusqu’au 28 novembre 2020 à la Galerie Cécile Fakhoury. Plus qu’une exposition, c’est une invitation à la réécriture d’une histoire culturelle et politique des noirs.

“Les Âmes du Peuple Noir”, une infiltration dans l’histoire des peuples noirs

Une exposition plaidoyer

Roméo Mivekannin nous emmène dans un voyage dans le temps. En effet, il procède à une réécriture de l’histoire des Peuples Noirs en s’attaquant à la représentation des noirs dans le monde du 19ème et 20ème siècle, jusqu’à nos jours.

Un travail documenté sur fond d’archives historiques

L’artiste Béninois, né en Côte d’Ivoire, se réapproprie l’histoire à travers ses oeuvres. Il puise son inspiration dans des fonds d’archives photographiques ou des toiles emblématiques de l’histoire de l’art occidentale. Le sujet principal de l’oeuvre devient l’artiste lui même. Il déploie son portrait sur les différentes oeuvres. En effet son portrait est substitué à celui des personnages noirs originaux figurants sur les oeuvres. Il se prend donc comme sujet pour nous pousser à l’interrogation. Si les témoignages de l’histoire passée en notre possession sont tels, quelle est notre place face à cette dernière? Aurions-nous nous aussi pu être ces sujets exhibés ça et là sous le regard inquisiteur du public? Telles sont les interrogations que nous sommes en mesure de nous poser.

Un acte de libération de nos ancêtres

Des oeuvres qui ont marqués l’histoire de l’art sont ainsi réecritent pour changer le paradigme de lecture. Ainsi, un nouveau champ des possibles est ouvert. Le visiteur est amené à poser un nouveau regard sur ces oeuvres historiques. La question de l’écriture de l’histoire est donc au coeur de l’exposition. On comprends donc que la répétition successive du portrait de l’artiste est un acte manifeste de réappropriation de l’identité. L’artiste l’explique en disant que ” Dans la tradition Vaudou, chaque dieu correspond à un ancêtre décédé. Quand on porte le masque de l’un de ces dieux, d’une personne qui a vécu, c’est un acte de libération”. Ainsi, “Les Âmes du peuple noir” fait écho à un hommage rituel à nos ancêtres. Il est donc un plaidoyer de rappel de l’histoire qui nous lie depuis des siècles et des siècles. Il est surtout une façon de rappeler que la place des Peuples Noirs dans l’histoire du monde n’est pas nécessairement celle qui a été la plus divulguée.

Une installation autour de l’ouvrage “The Souls of Black Folk” de W.E.B. Du Bois

Des hommes et des femmes engagés

En face de la galerie principale, dans le Project Space, Roméo Mivekannin nous propose un rendez-vous avec l’histoire des Peuples Noirs. Cette fois, nous procédons à une réécriture profonde de l’histoire. Nous sommes dans un espace de reconnaissance de l’existence de ce peuple. En effet, en se basant sur l’ouvrage de W.E.B Du Bois, l’artiste propose 31 portraits de personnalités noires politiques ou issues du monde de la culture. Ces portraits sont doublés de la sérigraphie d’une des pages de l’ouvrage “The Souls of Black Folk”. C’est un ouvrage fondateur des mobilisations autour de la reconnaissance des droits des noirs, aux Etats Unis et dans le monde. Nous sommes dans un lieu où nous pouvons apprécier les voix de la réécriture de l’histoire des noirs. Des portraits d’hommes et de femmes reconnus historiquement pour leur réalisation et leur engagement sont disposés dans l’espace. Cette installation est donc un prolongement de la réflexion.

Une réflexion tournée vers l’avenir

L’exposition de Roméo Mivekannin est une réflexion tournée vers l’avenir. Cependant, pour mieux se tourner vers l’avenir nous devons avoir conscience de notre passé. La question de la représentation des peuples noirs dans la société moderne a longtemps été basée sur des systèmes de domination. Ainsi, cette exposition est une invitation à briser les chaînes mentales construites au fil des siècles. Une nouvelle façon de se tourner vers l’avenir en apaisant les âmes de nos ancêtres. Mais surtout, une façon d’aller de l’avant en se libérant des “carcans” et en réécrivant cette part de l’histoire qui a été supprimée.

L’exposition se tient jusqu’au 28 novembre 2020 à la Galerie Cécile Fakhoury à Abidjan. Par ailleurs, l’Institut Français de Côte d’Ivoire animera une réflexion débat la décolonisation des corps dans le cadre de l’exposition. Rendez-vous, ce vendredi 27 novembre 2020 à 18h à la Galerie Cécile Fakhoury.

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