J’ai rencontré Samuel Nja Kwa lors de l’étape abidjanaise de son exposition photo « Route du Jazz ». Elle s’est tenue du 15 juin au 31 juillet 2015 au Sofitel Hotel Ivoire. Un événement coorganisé avec le partenariat du Cabinet de recrutement Africsearch. J’ai pris le temps qu’il me fallait pour écrire cet article car je souhaitais pouvoir échanger avec l’artiste sur ce projet que j’apprécie tout particulièrement. Il mélange deux arts, qui me sont chers en émotion : la photographie noir et blanc et la musique jazz.
La « Route du Jazz » où comment les musiciens racontent leur rapport à l’histoire
La “Route du jazz” se confond ici avec celle des esclaves africains. En effet, elle démarre en Afrique, donnant l’occasion d’un état des lieux de la culture musicale avant l’invasion européenne, pour s’achever en 1917, une année abstraitement fixée, mais décisive. Le Jazz, produit d’une forme de synthèse entre la création européenne et la tradition africaine rendue possible sur le sol américain, porte en lui les marques, les stigmates de l’histoire. L’exposition Photo la « Route du Jazz » donne donc la parole aux musiciens afin qu’ils racontent leur rapport à l’histoire. C’est en ce sens que Samuel Nja Kwa défini lui même son travail : « J’ai choisis de ne pas raconter. Je donne plutôt la parole aux musiciens. Ce sont eux qui racontent leur rapport à l’Afrique, leur rapport à l’esclavage, comment s’exprime leur africanité dans leur musique. Si j’en sais un peu plus sur l’esclavage aujourd’hui, c’est grâce au jazz, grâce aux musiciens. J’ai été avec le chanteur Ralph Thamar en Martinique, il m’a montrer les « cases nègres », les lieux d’habitation des Noirs pendant l’esclavage. A Saint-Domingue, j’ai vu des cimetières d’esclaves. Le jazz est une musique tellement puissante, qui vous entraîne dans des sentiments inimaginables : La révolte, la liberté, la joie… »
« Cette musique est née d’une rencontre forcée entre les instruments européens et la mémoire africaine. Les esclaves ont essayé de retranscrire ce qu’il leur restait de l’Afrique à travers la musique. Le jazz est différent que l’on se retrouve à Cuba, aux Etats-Unis, à Trinidad, à la Martinique, en Haïti. Et d’ailleurs par le terme jazz, je pense, rythmes afro cubains, reggae, Calypso, Kompa, jazz américain, le tango etc. Pour moi le jazz est un terme générique, une musique de liberté, une musique née hors d’Afrique dont le fil rouge est l’Afrique. »
Samuel Nja Kwa
Journalise et photographe d’origine camerounaise, diplômé en science politique à l’Université du Québec (Montréal), Samuel Nja Kwa est un photographe en constante recherche de la belle image. Celle qui vous émouvra !
Pour en savoir plus sur son parcours, les origines de ses influences artistiques, ses projets d’avenir… je vous ai réalisé un article accessible ici
Mon impression sur l’Exposition « Route du Jazz »
J’ai tout simplement adoré cette exposition pour deux raisons que j’ai expliqué en introduction, à savoir : la photographie en noir et blanc d’une part, et la musique Jazz, d’autre part.
Cette exposition m’a fait voyagé. J’ai été particulièrement émerveillée et émue de pouvoir voir rassemblé de grands noms du Jazz tels que Paco Séry, Omar Sosa, Cassandra Wilson, Marcus Miller, Manu Dibango, Mal Waldron ou encore Randy Weston… pour ne citer que ceux-là. Des percussionnistes tels que Guem ou Toumani Diabaté et Taj Mahal figuraient également au rang des personnes photographiées.
C’était d’abord un pur moment de plaisir de voir cet autre visage des artistes. En effet, au delà de la qualité des photos, du jeu d’ombres et de lumière, j’ai été principalement touchée par le naturel des clichés. A travers l’objectif de Samuel Nja Kwa, nous avons partagé un moment intime avec les artistes. Et je pense que c’est ce que nous devons retenir de cette exposition. Ici l’objet photographier, à savoir l’artiste, est le meneur de la danse, il est actif, il est vivant et il oriente le point de vue. Le photographe devient donc le premier spectateur de sa propre œuvre. C’est un beau travail, d’une part, sur la présentation et la représentation et d’autre part, sur le rôle actif ou passif que l’on veut donner au spectateur.
Concernant le côté noir et blanc de l’exposition, j’ai été ravie d’apprendre que Samuel Nja Kwa apprécie aussi cette thématique. Il indique : « J’aime la photographie en noir et blanc pour des sujets très personnels. Le noir et blanc a aussi un cachet artistique. J’aime jouer avec les ombres et lumières. La photographie de jazz a aussi une tradition noir et blanc. Cette photographie noir et blanc c’est aussi l’ambiance des clubs de jazz, des concerts. Le jazz est une musique historique, chargée d’histoire, qui rappelle le passé. Aujourd’hui cette musique évolue à la rencontre d’autres rythmes. Le jazz est pratiqué par tout le monde, c’est une musique universelle. Il m’arrive de faire des photographies couleur ou noir et blanc selon l’ambiance. »
C’est donc sous la douce mélodie d’un saxophoniste présent pour le vernissage que j’ai pu me laisser aller à voyager sur cette «route du jazz» dont les grandes lignes ont été retranscrites dans un livre souvenir contenant l’ensemble des photos avec la présentation des contextes dans lesquels les photos ont été prises. Un autre moyen d’être encore au plus près des artistes photographiés ! Je vous laisse donc découvrir…
Lien vers le site officiel : www.samuelnjakwa.com
Voici quelques photos prises durant l’exposition :
Pour ceux qui n’ont pas pu apprécier le travail…
Je tiens à porter à votre connaissance que Samuel Nja Kwa réalise un tour du monde pour la promotion de cette exposition. En effet, elle continue de voyager. Il vient de la présenter à la Durban Art Gallery en Afrique du Sud, puis à l’Institut Français de Johannesburg. Il l’a auparavant présenté à l’Espace Germinal à Fosses en France avec un concert du saxophoniste haïtien Jowee Omicil. Une autre exposition aura lieu du 16 au 31 mars 2016 à l’espace Renaudie à Aubervilliers dans le cadre du festival Banlieues bleues (flyer 4 pages Musiques et métissages). Dans quelques mois elle ira au Sénégal.
Le souhait de Samuel Nja Kwa est de pouvoir la présenter en 2017 au Festival de jazz de Saint-Louis. Nous lui souhaitons que ce vœu se réalise afin que la « Route du Jazz » soit à nouveau vécue comme mémoire à l’histoire mondiale de ce mouvement musical. En attendant, à vos agendas !
Ping : SAMUEL NJA KWA – ORIGINΛL – Arts & Culture
Ping : Joël-Eric Missainhoun
Ping : Abidjan : Manu Dibango donnera le coup d'envoi d'une tournée mondiale qui célébrera ses 60 ans de carrière musicale -
Ping : SAMUEL NJA KWA - ORIGINΛL - Arts & Culture
Ping : Joël-Eric Missainhoun - ORIGINΛL - Arts & Culture