Jean-Baptiste Djeka est un artiste plasticien ivoirien qui s’est déjà fait repéré lors du Concours Les Guyzagn organisé par la Galerie Houkami Guyzagn. Il exposera très prochainement à la Galerie Houkami sur le thème : “un recours aux sources pour une introspection vraie”. En marge de cette exposition, il participera à l’Action sociale organisée par ORIGINVL dans le cadre des activités définies par les abonnées au mois de novembre 2016. Cette action se tiendra ce samedi 11 février 2017. En attendant d’avoir plus d’informations sur ce projet, découvrez Jean-Baptiste Djeka a travers une interview exclusive.

1.Bonjour Jean-Baptiste Djeka, pouvez-vous vous présenter en quelques lignes ?
Je suis Djeka Kouadio Jean Baptiste. Je suis un artiste plasticien ivoirien originaire de Sakassou dans le centre de la Côte d’Ivoire.
J’ai une formation artistique réalisée au Centre technique des arts appliqués de Bingerville de 1999 à 2003. Pendant ces trois (3) ans de formation je me suis spécialisé dans la sculpture avec option peinture, décoration et design et j’ai obtenu en définitive un brevet des Arts Appliqués.
2. D’ou vient votre passion pour les arts ? Votre inspiration ? Vos influences ?
Ma passion pour l’art est quelque chose que je considère comme inné. Elle est venue de ma prise de conscience de mon identité personnelle et de mon moi en tant qu’individu. J’ai par ailleurs toujours été influencé par la manière d’être des africains : leur façon de se comporter, leur façon de vivre et d’évoluer dans leur environnement riche.
Ce qui m’inspire : c’est la pensée africaine. Pour moi, les hommes, plus généralement, et les africains, plus particulièrement, existent par ce qu’ils ont une pensée.
3. Comment Jean-Baptiste Djeka se défini de façon technique ?
Au niveau de ma technique, on dira qu’elle est mixte. J’ajouterai qu’elle est pluridisciplinaire puisque j’ai eu la chance de travailler aux côtés de grands peintres tels que Fadaero, Augustin Kassi, Diomandé ou encore Christophe Sawadogo. Je travaille particulièrement sur des coulés partant d’un point de départ à l’instar du point de départ qui passe et laisse une trace indélébile.
Mon objectif est d’impacter la conscience des filles et des fils d’Afrique et de la planète bleu car nous sommes présents sur la terre aujourd’hui mais nous partirons un jour et nous devons laisser une trace positive de notre présence aux générations futures afin qu’elles aient les bases pour aller encore plus loin.
4. Pouvez-vous nous parler de votre participation au Concours les Guyzagn 2016 ?
Le Concours des Guyzagn 2016 avait pour thème « L’art et notre richesse : le cacao ».
Ce concours m’a fait penser à une citation de Nanan Houphouet Boigny (Premier Président de la République de Côte d’Ivoire) qui disait que le succès de notre pays repose sur l’agriculture. Et pour moi, je l’ai réinterprété en disant que le succès, l’avancée, le développement, le progrès, la culture de la conscience vient de notre culture propre. L’œuvre était un tambour avec le schéma humanoïde qui envoie de l’énergie à tout l’univers. Il représente l’espoir tout comme le dit notre hymne : nous envoyons l’espoir à l’humanité. Je souhaiterais que les fils du monde et les ivoiriens en particulier comprennent ce tableau comme ca.
5. Quels sont vos projets ?
Le projet en cours est l’exposition qui se tiendra très bientôt à la Galerie Houkami et dont vous aurez la date très prochainement.
Le thème est : « un recours aux sources pour une introspection vraie »
Cette exposition est une invitation, un pèlerinage une méditation que je propose aux fils et aux filles d’Afrique et au monde en général pour que chacun se rappelle que nous sommes d’abord une « pensée ». L’idée est que l’on comprenne que le mode de vie des africains est à préserver pour que l’humanité puisse s’en sortir.
Dans cette exposition, il y a de nombreux symboles forts.
Le premier est le pagne. Pour nous, africain, il est d’abord un moyen de se couvrir mais pour moi, il représente la protection maternelle. C’est donc en hommage à elle, les femmes, les mères, que je mets cet élément dans mes toiles. De plus, notre mode de vie, de pensée, de réflexion en Afrique est garantie par les femmes. Elles sont donc les gardiennes réelles de cette tradition.
L’éléphant est l’emblème de la Côte d’Ivoire et il a une représentation spirituelle forte notamment dans la culture bouddhiste. Il représente donc la force centrifuge.
L’ancre du bateau me permet de matérialiser l’ancrage de cette force centrifuge.
Le serpent représente l’homme à l’image du spermatozoïde que chacun est avant de devenir humain. Par ailleurs la symbolique du serpent a un fort caractère biblique pour moi ainsi que son sens au niveau médical. Le serpent est donc une forme de thérapie pour inviter chacun à aller chercher aux tréfonds de lui même, les réponses à son existence.
Le tabouret Baoulé, lui est le siège, le trône où s’asseyent ceux qui ont été élus par le Divin et qui sont appelés à diriger
Après cette exposition je travaillerais sur un projet de conscience sur les groupes ethniques africains afin de les traduire dans le domaine des arts.
En terme de vision, je vois l’art et la pensée africaine dans tous les hauts lieux de la culture à l’instar des monuments et des symboles forts tels que les pyramides égyptiennes car je souhaite que les africains continuent de travailler pour que l’humanité soit encore plus rayonnante.
Mon souhait serait également d’exposer dans des musées sur tous les continents.
6. Que pensez-vous de l’avenir des arts en Afrique plus précisément en Afrique Noire ? Pensez-vous que les arts africains ont une partition à jouer dans le développement d’une Afrique moderne et ouverte sur l’extérieur ?
Le brassage et le métissage sont souvent perçus, à tort ou à raison, par les africains comme une perte de leur identité. Je pense qu’il faut noter que ce brassage, ce métissage sont l’avenir. Les africains sont une partie prenante de ce brassage et ils doivent en prendre conscience pour aller de l’avant.
Ma pensée pour l’art en Afrique noire se résumerait au « Soleil ». Ma Maman dit que l’on ne peut pas cacher le soleil avec la main. Avant on disait que l’art africain était l’art primitif. Maintenant on dit que c’est l’art premier. On a essayé de rendre péjoratif l’art africain ainsi que les courants de pensées associés mais aujourd’hui on revient en arrière. L’art Africain a toujours été présent et fort. Nul ne pourra caché le rayonnement de l’art Africain et de l’art en Afrique et dans le monde. Toute l’humanité reviendra à l’art.
Je pense aussi que dans la communauté, on ne peut pas faire le bonheur d’une personne si elle n’a pas l’envie première d’être heureuse. Ainsi, le développement de l’Afrique atteindra son paroxysme lorsque les africains l’auront décidé. Cette richesse est enfouie dans notre courant de pensées et nulle part ailleurs. L’Afrique s’ouvrira au monde car elle n’a pas le choix mais elle doit le faire en expliquant sa particularité avec ses propres mots et sa propre intégrité.